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5 août 2008 2 05 /08 /août /2008 14:52





AFRIQUE ET DEMOCRATIE : UN LONG CHEMIN



          L'esprit démocratique, la culture de démocratie, se heurte à des écueils lourds et profonds, tenant à une série de facteurs socioculturels. Le nier ne fait rien avancer.
          En tout premier lieu, le poids excessif du groupe sur l'individu (déjà mentionné ici mais combien important). Ensuite la tyrannie de l'âge. L'obéissance ou la soumission aveugle à l'aîné, simplement parce que c'est l'aîné. Certes. Le respect et la considération dus aux personnes âgées est une nécessité qui s'impose et une marque de civilisation (qui différencie de l'annimal) mais dans les justes proportions, sans idolâtrie ni abdication de sa conscience ou son libre arbitre, bref de sa faculté de jugement et de discernement.
          La solidarité familiale et celle du groupe, ce bien si précieux comporte cependant, parfois, un revers redouta-ble en Afrique. En niant l'individu, c'est-à-dire son existence,  par ricochet, la liberté et la responsabilité individuelles, on tue le moteur de la réalisation de soi. Sans cette liberté et la responsabilité de l'individu, il n'est pas d'épanouissement véritable ni progrès par l'effort de construction de soi. 
          En Afrique le groupe tue.
          Autre écueil. La place du chef dans la société et dans l'imaginaire des Africains est aussi un facteur de démobilisation mentale et d'inhibition contraire à l'esprit démocratique. Puisque le chef est "Chef", c'est-à-dire oint des cieux  -pense-t-on- il a tous les pouvoirs.
          Ainsi le Président de la République, chef de l'Etat, incarne tous les pouvoirs en sa personne : le pouvoir absolu. Son fils sera ipso facto président et chef de l'Etat à la mort de sont père, dans la plupart des cas. Il jouit aussi le plus souvent de l'impunité.
          Contrairement au principe et à l'éthique de la monarchie ou de la chefferie ailleurs, où le roi ne justifie son pouvoir que par l'obligation morale de protection et de justice envers son peuple. Dans les monarchies anciennes et modernes, le serment royal n'est pas dénué de sens. Le roi, en accédant au trône, prête serment devant ses sujets, jure fidélité à la nation, jure de défendre son peuple, de le protéger, de lui garantir paix et bonne justice, la main sur des reliques, sur la Bible ou la Constitution. Le Président de la République, dans les régimes républicains fait le même serment devant la nation.
          Ce faisant, le roi des monarchies modernes comme le président se lie au peuple par un contrat (à la fois politique et moral). Ce contrat est le fondement même du principe démocratique et du pouvoir des gouvernants, garant des libertés. Les révolutions avaient pour origine (et justification) dès le Moyent-Age (en Europe), la rupture de ce contrat par le souverain.
          C'est cette notion de contrat qu'il faut aujourd'hui inscrire dans la culture politique en Afrique. Le déni de droits et de justice frappe le progrès dans ses racines. Les gouvernants ont un problème de légitimité dès lors qu'ils ignorent leurs responsabilités à l'égard des citoyens et de la nation, et surtout quand ils considèrent que leurs droits sont supérieurs à leurs devoirs.
          Certes, les présidents africains font sans doute le même serment qu'ailleurs lors de leur investiture mais qui ne va guère parfois au-delà des mots, sans réelle conscience de l'engagement et la responsabilité que ces mots impliquent.  En Afrique, au temps de la traite des Noirs et de l'esclavage, c'est le  roi ou le chef qui vendait ses sujets aux étrangers sans avoir à rendre de comptes.
          Quelle place cette culture du chef ayant le droit de vie et de mort sur son peuple occupe-t-elle encore dans le subconscient de certains Africains ? Quelle est la part d'une telle culture aujourd'hui concernant les présidents africains ? Fonde-t-elle encore leur conception du pouvoir ?
          Or, il existe dans le plus profond de l'histoire de certains peuples africains des éléments très intéressants par rapport au respect des droits de l'individu, et la bonne gouvernance, qui peuvent aujourd'hui servir de ferments à l'éclosion d'une démocratie moderne et authentique.
          C'est à ces sources qu'il faut pouvoir puiser afin d'y retrouver les fondements de la régénération politique en Afrique.
 

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