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16 septembre 2012 7 16 /09 /septembre /2012 11:18

028.gifFeu sur le prof !

 

L'enseignant se bat seul, contre tous : les familles, l'administration, la hiérarchie... sans oublier les agressions des élèves dans certains établissements.

 

Si le système scolaire français n'est pas tendre avec les jeunes, il ne l'est pas davantage avec les enseignants, aujourd'hui humiliés, dévalorisés, démoralisés.

 

fleche 264Le regard de la presse

 

etoile 113De l’intérieur

 

Chez les enseignants, les retraites ne sont que la face émergée d'un malaise bien plus profond. Confrontés, en direct, aux tensions et aux multiples violences nouvelles – physiques et morales – d'une société plus anxiogène que jamais, ils sont minés par une sorte d’énorme lassitude professionnelle et morale. Non seulement ils se sentent démonétisés et dévalorisés, mais ils ont le sentiment d'avoir perdu leurs repères, le sens de leur mission, pis d'être abandonnés à eux-mêmes, d'être placés en situation d'échec... Et, qui plus est, d'être considérés comme les seuls responsables de cet échec. Leur désenchantement et leur colère sont à la mesure de cette crise d'identité...

Ouest-France, l'analyse du mouvement de grève des enseignants au printemps 2003 

 

17Les coups subis par les enseignants ne sont pas uniquement portés par les élèves et la hiérarchie scolaire, mais aussi par les parents qui sont généralement solidaires de leurs enfants dans le dénigrement des professeurs, voire les agressions dont ces derniers sont l'objet. Pour la hiérarchie comme pour les parents, l'échec des enfants est généralement imputé aux enseignants. Le professeur devient ainsi le bouc émissaire qui masque les carences structurelles éducatives des uns et les lâchetés des autres.

 

Parmi les fardeaux du prof figure en bonne place la pression institutionnelle et sociale, celle de la hiérarchie et des familles, sourde et aveugle, qui lui demande chaque jour plus et trop, sans aucune considération de ses moyens, de ses difficultés professionnelles ou privées, de sa réalité de vie. Le prof devient cette machine à tout faire, dont on peut disposer à volonté pour résoudre tous les maux de la société.

 

fleche 264Le regard de la presse

 

etoile 113De l’extérieur

 

Si les professeurs français vont si mal, c'est que personne ne les aide à accomplir leur mission. Ni la société, ni leurs ministres successifs, ni leurs syndicats...

 

Une chose est sûre, le corps enseignant [...] est aujourd'hui, en France « un corps psychotique », qui voit des fantômes partout, qui se sent agressé et mal aimé. Pourquoi ? Tout simplement parce que les collèges et les lycées ont la lourde tâche de « sauver les valeurs républicaines ». Or ces valeurs sont attaquées de toutes parts.

 

L'enseignement secondaire a cessé de fonctionner comme une garantie d’ascenseur social, et cela dans un contexte où les partis n'offrent plus d'espoir, où les Eglises n'occupent plus les enfants après l'école, où es syndicats ont cessé d'encadrer et d'intégrer les immigrés, et surtout, où la famille n'est plus un refuge face à toutes les menaces. On demande au professeur d'être le « soldat civil » de la République alors que la situation n'a plus rien à voir avec ce qu’elle était à l’époque ou fut créée l'école publique, gratuite, obligatoire et laïque. Les conditions du sacerdoce éducatif ont changé. Le monde est moins aimable ; les élèves, moins réceptifs et moins soumis... Les ministres et les projets de réforme se succèdent sans rien changer...

El Pais( quotidien espagnol), in Courrier international, juin 2003

 

17A l’époque « où fut créée l'école gratuite, obligatoire et laïque », le professeur, c'était « Monsieur le professeur » ; aujourd’hui, ce n'est plus le professeur, mais le « prof ». Un indice révélateur : rares sont les enseignants de collège et de lycée qui emploient couramment et spontanément le vocable « professeur ». Pour la plupart, l'ordinaire, c'est « prof » y compris en présence de leurs élèves à qui ils demandent de venir les voir « en salle des profs ». L’usage de ce mot « prof » n'est pas anodin. Il y a 40 ans, c'était le « professeur ». Mais les mutations seraient minimes voire insignifiantes si elles ne s'incarnaient que dans une simple évolution sémantique. Plus conséquemment, elles concernent égaiement l'élève et la famille

 

Des élèves arrivent en classe saturés d'images et de sons, tous éléments qui empêchent de penser, de réfléchir et rendent en conséquence le sujet peu réceptif intellectuellement et passif. Or, à quoi professeur sert le professeur sinon à amener l'élève à penser par lui-même, à le rendre capable de raisonnement, de jugement autonome et libéré ? La « télé » aurait-elle tué le professeur ? Les élèves attendent du prof que son cours les mette dans « la situation du spectateur devant sa télé avec beaucoup d'images et de jeux. Certains demandent davantage : que le professeur disparaisse derrière les images et les jeux, qu'il les laisse rêver ou bâiller ».

 

Même en accédant à tous ces vœux, la paix scolaire n'est pas toujours garantie pour autant. Et dans ce combat inégal, le prof n'a pas toujours le dessus.

 Tidiane Diakité, Mutations et crise de l'école publique. Le Professeur est mort, vive le prof, L'Harmattan.

 

fleche 070Que faire ?

 

etoile 116Rallumer la flamme sacrée

 

La passion du métier, le désir ardent de servir l’école sont des réalités constantes chez beaucoup d’enseignants. Leur mérite est d’autant plus grand. Ceux-là permettent de nuancer ce tableau gris-sombre de l’école de la République. Il faut à la fois les encourager et multiplier leur nombre. Beaucoup aiment ce métier. Ils souhaiteraient l’exercer le mieux possible.

 

A cette fin, il est urgent de procéder à une profonde refondation de l’honorable Institution : marier l’école à son temps, afin de lui conserver la plénitude de sa mission fondatrice, mission de formation du citoyen accompli : libre, épanoui et social.

 

C’est à cette œuvre de salut public qu’il faut convier toute la nation par-delà les clivages politiques, sociaux, culturels afin de mener à bien la tâche car l’école n’est la propriété ni des enseignants, ni des parents, ni des politiques. Elle ne doit pas être l’otage du temps politique, trop court et trop inconstant par rapport au temps de la nation.

 

C’est à la reconquête de son école que doit s’employer la nation tout entière en élaborant une véritable charte pour l’école du XXIe siècle.

 

Sauver l’école pour bâtir tous ensemble la Cité harmonieuse de demain, pour tous.

livre 006


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commentaires

L
<br /> Bonjour, Tidiane,<br /> <br /> <br /> si je souscris à ce que vous écrivez dans ce message ? Et comment ! C'est joliment bien vu. Et bien dit, comme<br /> toujours.<br /> <br /> <br />     Me permettrez-vous d'introduire une note non pas dissonante, mais un brin différente ? Toutes les causes<br /> invoquées pour expliquer le malheur de l'enseignement en France ne devraient pas nous faire oublier une calamité importante dont nous souffrons aussi : soit nous ne croyons à rien, soit nous<br /> n'osons pas montrer que nous croyons à quelque chose. Lorsque j'entends des écrivains, des journalistes, des intellectuels utiliser un français monstrueux, tellement négligé que le sens a parfois<br /> disparu, ce n'est pas la "faute" de français qui me choque, c'est le fait que l'on s'en fiche. On ne se reprend pas, on ne se corrige pas, on s'en remet à celui qui écoute pour comprendre comme<br /> il pourra.  Cet exemple, qui concerne le français parlé, n'est pas sans lien avec le français écrit, y compris par des personnes d'un bon niveau de langage. Mais surtout, il en va de même<br /> dans bien des domaines, de bien des façons.<br /> <br /> <br />     Etudiant, je prenais part, parfois, à des "actions" militantes, ou formatrices, ou sociales, dans lesquelles je<br /> retrouvais une majorité de "croyants" : cathos et communistes. Les uns, comme les autres, croyaient à quelque chose. Nous avions monté un stage de formation pédagogique car cette formation ne<br /> nous était pas donnée par l'Université. On y croyait : à notre "foi", chacun la sienne, et à notre futur métier de professeurs. On vibrait, on ne s'en cachait pas, dans un enthousiasme propre à<br /> la jeunesse et pourtant peu répandu parmi les ajutres étudiants : déjà, dans ce passé lointaint...<br /> <br /> <br /> Je me souviens aussi d'avoir été choqué par le manque d'enthousiasme de mes collègues les jours de rentrée scolaire au retour des<br /> vacances d'été. Ils aimaient leur métier, mais affichaient des mines d'enterrement en se plaignant d'avoir à "reprendre le colier". La ferveur, la joie étaient des tabous. Plus facile de montrer<br /> son cul à la télé que de laisser s'échapper les signes du bonheur à la reprise des cours. Le pire, si l'on peut dire, c'est que ces mêmes collègues se donnaient corps et biens à leur métier, à<br /> leurs élèves ! Mais l'air du temps, c'était d'avoir l'air... de ne pas y croire !<br /> <br /> <br />     Me permettrez-vous de conclure qu'une multitude de causes d'ordre sociologique ne devrait peut-être pas nous<br /> faire oublier qu'il existe aussi des valeurs spirituelles ? Quand ces dernières sont mortes, la guérison risque d'être une opération délicate. Or, il est possible de considérer comme<br /> valeur "spirituelle" (au sens où je fais intervenir cette dimension, et en priant tout lecteur éventuel de bien vouloir me pardonner cette sorte d'impudeur ?) il existe, dis-je une vraie valeur<br /> dans l'enthousiasme et l'inventivité de nos collègues d'aujourd'hui, comme du reste dans une immense partie de la population, jeune en particulier. C'est comme si l'eau du puits était là, mais<br /> faute d'un seau et d'une corde nous sommes privés de la joie du partage, et de la boire ! Amitié, Luc.<br />
Répondre
<br /> <br /> Mon Cher Luc,<br /> <br /> <br /> Quelle osmose de pensée ! Et surtout quelle belle philosophie !<br /> <br /> <br /> Oui, mon cher Luc, vous avez mille fois raison. Osons ! et surtout osons dire !<br /> <br /> <br /> Cordialement<br /> <br /> <br /> T.D.<br /> <br /> <br /> <br />
S
<br /> Oui, le professeur est désormais réduit au prof. C'est dire que les enseignants et la société entière ont contribué à désacraliser l'image de l'enseignant. Ce glissement n'est pas anodin. Bien<br /> vu, donc ! D'autre part, tu n'as pas tort dde dire que l'élève semble venir à l'école pour retrouver dans le professeur ou derrière lui la continuité des images de sa télévision framiliale.<br /> <br /> <br /> J'apprécie beaucoup la réflexion du journal espagnol El Pais. Le contenu de l'extrait que tu nous proposes est d'une extraordinaire vérité. C'est tout à fait mon avis sur le<br /> problème de l'enseignement en France. Les institutions et les structures sociales ont complètement démissionné et ne comptent plus que sur l'école. Or, l'école, ce sont surtout les<br /> enseignants, des humains. Et ces humains-là ne peuvent pas tout faire, ne peuvent pas remplacer la société entière surtout quand celle-ci leur refuse les moyens d'accomplir la mission qui leur<br /> est confiée. La société oublie qu'elle n'attend plus de l'enseignant qu'il apporte des connaissances à l'enfant mais les valeurs qu'elle n'est plus capable de lui<br /> donner.      <br /> <br /> <br />  <br />
Répondre
<br /> <br /> Bravo ! Quelle pertinence ! Et quelle profondeur d'analyse de notre société.<br /> <br /> <br /> <br />