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21 mai 2017 7 21 /05 /mai /2017 07:08

 

VUE D’AFRIQUE.

 

 

L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE FRANÇAISE 2017

 

 

Un intérêt certain. Mais quel intérêt ?

Quelle incidence sur la culture politique ?

 

Une élection française plus suivie que les élections nationales. Pourquoi ?

Selon maintes sources autorisées et des observateurs avisés, l’élection présidentielle française de mai 2017, a été suivie avec une certaine effervescence et a suscité plus d’intérêt que les élections organisées en Afrique même, tous pays confondus : de l’Afrique du Nord à l’Afrique subsaharienne, anglophone, lusophone…

Cet intérêt pour l’élection présidentielle française n’a rien d’étonnant cependant pour qui connaît la singularité des rapports entre la France et les États africains (au-delà de ses anciennes colonies).

 

Parmi tous les pays présents en Afrique au titre de la coopération ou de l'aide, aujourd'hui comme hier, la France émerge comme le pays qui, dans ce continent, dispose d'une dimension singulière. C'est de loin le pays qui s'identifie à l'Afrique et auquel l'Afrique s'identifie, au point que, pour nombre d'Africains, l'Europe se trouve en France et se résume à la France. Les propos de ce vieux Malien dont le fils est éboueur à Paris en sont révélateurs à plus d'un titre. Interrogé pour savoir depuis quand son fils était en Europe, il répondit : « Non, il n'est pas en Europe, il est en France ». Ce sentiment singulier fait également que beaucoup d'Africains en France se considèrent, un peu, par réflexe, comme chez eux, y compris des Africains anglophones ou lusophones, donc ressortissants d'anciennes colonies anglaises, portugaises ou belges. La France est ainsi le pays du monde dont les Africains parlent le plus, en bien ou en mal.

 

L'histoire a érigé la statue de la France au cœur de l'Afrique, et dans le cœur des Africains. Personne en Afrique (de l'Est comme de l'Ouest, du Nord comme du Sud) n'est indifférent à ce qui se dit ou se fait en France, soit qu'on l'approuve, soit qu'on le désapprouve. La France et l'Afrique sont comme unies par les liens d'un mariage non déclaré, mais consommé. C'est sans doute en raison de cette spécificité que la coopération française revêt une signification particulière et sert de réfèrent à la coopération et à l'aide internationales en Afrique. Cette position spécifique reste un acquis à la France. Grandeur ou servitude ? Sans jugement de valeur. Chacun appréciera à l'aune de sa sensibilité et de sa vision de l'histoire.

 

Mais, à l’évidence, l’élection présidentielle française de 2017 semble avoir suscité plus de ferveur, d’intérêt et de commentaires en Afrique qu’aucune autre élection présidentielle par le passé, en France. Serait-ce l’effet Macron ? Son jeune âge ? Son charisme ? La nouveauté de son message politique, nationale et internationale ? Sa volonté et son ambition de refondation de la politique ?, bref, sa vision du monde e du futur ?

 

Emmanuel Macron

Président de la République française (2017)

 

Un effet probable (ou souhaitable) sur les mœurs politiques du continent ?

Quel pourrait être l’effet positif escompté pour les populations et les pays africains ?

Une refondation de la culture politique ? Dans ces cultures où le plus âgé, parce qu’il est le plus âgé, a toujours raison, quoiqu’il dise, quoi qu’il fasse.

Où l’aîné, quel qu’il soit, quoi qu’il fasse, à tous les droits sur le plus jeune. Son avis, quel qu’il soit, ne se discute pas.

Où, enfin, le chef, parce qu’il est chef (fût-il « démocratiquement » élu), est l’oint du Ciel, et, à ce titre, dispose d’un pouvoir absolu, de droit divin.

 

L’effet d’une telle culture de gouvernement n’est pas toujours heureux. Il n’est pas exceptionnel dans ces conditions, de voir des personnages atteints de débilité sénile, s’accrocher désespérément au pouvoir, faisant ainsi fi de l’intérêt du pays et de celui de la fonction.

Vous imaginez alors aisément l’effet Macron : élu président de la République à 39 ans, pour un mandat de 5 ans, durée qu’il est contraint de respecter, en conformité avec les Institutions en vigueur et la culture politique du pays. Cela ne peut manquer de faire son effet sur nombre d’esprits en Afrique.

Imaginez un peu : Macron avait un an et demi quand Obiang Nguema [président de Guinée équatoriale] s'est emparé du pouvoir, un an et neuf mois lorsque Dos Santos [Angola] a succédé à Neto, deux ans et demi quand Robert Mugabe [président du Zimbabwe] a remporté sa première élection, moins de cinq ans le jour où Paul Biya [Cameroun] s'est installé au Palais d'Etoudi... Sur un continent où les aînés ne lâchent ni leur pouvoir ni leur tutelle sur les cadets, qu'ont-ils en commun et qu'auront-ils à se dire ?

Hebdomadaire Jeune Afrique, 14-20 mai 2017

 

 

La galaxie des présidents dinosaures ?

Le continent africain se caractérise effectivement par la longévité exceptionnelle du mandat des chefs d'État. On y compte à ce jour dix-sept chefs d'État au pouvoir depuis plus de vingt ans ; quatre depuis plus de trente ans ; une bonne dizaine depuis plus de quinze ans. Record du monde ; Omar Bongo, décédé en juin 2009, après 41 années de pouvoir, sans discontinuer. Combien de temps y serait-il resté s'il ne s'était pas éteint en 2009 ?

Si au moins une telle longévité à la tête de leur pays se justifiait par des actes, des réalisations apportant aux populations bien-être, développement et épanouissement ! Si la prospérité d'un pays était fonction de la longévité du pouvoir du chef de l'État, il y a longtemps que l'Afrique serait sortie du sous-développement. Mais c'est le contraire : le plus souvent, le bilan global est inversement proportionnel au nombre d'années passées au pouvoir.

Tidiane Diakité, 50 ans après, l’Afrique, Arléa, Paris, 2011.

 

 

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commentaires

A
Analyse et point de vue très intéressants sur l'élection présidentielle.<br /> Merci pour ce commentaire.<br /> Alain
Répondre
Merci pour cette appréciation. TD