Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Recherche

8 août 2010 7 08 /08 /août /2010 15:04

livre_024.gifEntre culture de l'écrit et culture de livre 010l'oralité

 

 

Lorsque le jeune Français (ou le jeune Européen) naît, il trouve sur la table familiale en même temps que le biberon, l’histoire écrite de son pays, de sa culture et de sa civilisation. Adolescent, il les trouvera dans la librairie ou la bibliothèque où il pénètrera pour la première fois. Dans les livres, il trouvera les instruments qui l’aideront à cheminer, adulte, sur les voies jadis tracées par ses ancêtres proches et lointains ; des instruments pour explorer et redessiner le monde à partir des schémas anciens revus.

Rien de tel pour le jeune Africain qui, en fait d’écrits et d’instruments, moyens de construction de soi et de sa pensée, ne dispose à la naissance, que de quelques échos dilués par le temps, de la vie et de l’action de ses ancêtres : échos tributaires de la mémoire des hommes, parfois de leurs humeurs, sans garantie de rigueur et d’authenticité. Ce défaut de culture de l’écrit (non d’écriture), celle de la preuve par la lettre et le chiffre, fait qu’en Afrique (subsaharienne s’entend) la qualité de la transmission de la pensée, du savoir et du savoir-faire demeure une question primordiale, parce que soumise aux aléas et aux limites de la mémoire, en conséquence, victime potentielle du temps.

Le défaut de culture écrite a été doublement déterminant dans le regard porté sur l’Afrique par le reste du monde (particulièrement l’Europe), par tous ceux qui croient qu’il n’y a pas d’histoire sans écriture, ni de civilisation sans histoire écrite. L’Afrique n’entre officiellement dans l’histoire qu’au XIXe siècle avec la colonisation comme si cette date marquait l’apparition par génération spontanée de tout un continent et des êtres qui le peuplent. Son histoire propre est niée, gommée, il ne peut y en avoir, faute de preuves écrites et lisibles. L’absence d’écriture a empêché la capitalisation de faits, de connaissances et de richesses culturelles enfouis au fond des siècles et des millénaires, toute cette sagesse contenue dans l’oralité « le verbe, la parole, le symbole, le rythme ». Ce qui explique un long piétinement des techniques et des savoir-faire ancestraux ayant subi les faiblesses et les limites de la mémoire humaine. On fait dater le début de l’histoire de la Chine de 1250 av JC environ, tout simplement parce qu’il a été retrouvé les noms des rois Shang gravés sur des carapaces de tortues datant de cette époque, histoire rimant ainsi avec écriture selon les critères occidentaux.

Les progrès de lalangue chinoise au début de ce XXIe siècle, son extension sur le monde va de pair avec l’expansion économique de la Chine. De plus en plus d’écoles secondaires en France et ailleurs en Europe ont incorporé l’enseignement du chinois comme discipline d’excellence parce que langue écrite. Rien de tel pour Afrique où, à l’inverse, les langues ont tendance à décliner faute d’écriture.

Sur les 6 000 langues que compte le monde selon l’UNESCO, l’Afrique à elle seule en renferme le tiers. Mais 80% de ces langues sont uniquement orales. Elles ne peuvent avoir de ce fait aucun rayonnement international. Pire, menacées de disparition du fait de la globalisation ainsi que de la prédominance croissante des « grandes langues » : anglais, chinois, français, allemand… leur disparition signifie celle de toute une vision du monde qui n’enrichira plus ni l’Afrique, ni le patrimoine mondial.

Les peuples africains sont de ceux qui ont à se battre aujourd’hui pour faire reconnaître leur existence, mieux, leur droit à l’existence, c’est-à-dire leur passé, leurs cultures et leurs civilisations et convaincre qu’ils ont des valeurs aussi irréfutables et respectables que tous les autres peuples du monde, bref, qu’ils appartiennent bien à cette même espèce humaine, à égalité de dignité.

En réalité, s’il y a nécessité de livrer une telle bataille, celle-ci doit consister à fouiller les « entrailles de l’Afrique » afin de mieux y lire son identité, non pour s’y enfermer ou s’y ensevelir, mais pour la révéler et donner plus de raison d’espérer de l’Afrique.

 

     Ecriture et oralité        

 

Il n’y a pas de hiérarchie à établir entre les deux. Si l’écrit fixe la pensée et facilite le voyage dans le temps et dans l’espace, servant ainsi de passerelle vers l’Universel, la parole est vie et souffle.

Il faut plutôt voir ce que nous faisons de l’un et de l’autre ou ce qu’ils font de nous.

Au commencement était le verbe, la parole qui précède de loin le livre et l’écrit. Il s’agit d’en faire des outils de communication, d’ouverture, d’épanouissement individuel et collectif au service des hommes, par le biais de l’art et de la culture en général (ceux du corps et de l’esprit), vecteur de rencontre et de fusion.

 clipart_objets_050.gif

Partager cet article
Repost0
1 août 2010 7 01 /08 /août /2010 17:19

bn3.gif

 

BILLET DU JOUR

 

Lu pour vous

 

 

RIEN NE VA PLUS DANS LA MAISON EUROPE. Les crises se succèdent au point de gagner même les terrains de foot. Les défections se multiplient dans les rangs des disciples, si l'on en croit Benoît XVI, qui ne cesse de parler de l'affaiblissement de l'Église catholique européenne. Avec des régimes draconiens, des politiques rabat-joie, la dépréciation de l'euro par rapport au dollar, des mesures d'austérité, le mammouth fond à une vitesse vertigineuse. A quoi s'ajoutent un chômage massif, des menaces sur les services publics, des taxes sur les banques…

Pis, toute l'Europe n'a plus qu'un mot à la bouche: rigueur. Pendant que l'Allemagne et l'Angleterre taillent dans leurs budgets, la France réduit son train de vie. Plus de garden-parties désormais, un 14 Juillet au rabais, circulez, pas de petits fours sous les plafonds dorés.

Tout cela m'attriste. Et je proteste contre ces décisions. Car j'associe la grandeur de la France à son faste, et je confonds volontiers la République avec ses lambris. Je rêve des cours européennes, poussiéreuses et pour la forme, certes, mais remplies de leur gloire passée. J'aime croire en la puissance de l'Allemagne et au lustre de l'Italie. Par conséquent, au nom des immigrés dont je fais partie, je préviens les Européens : on n'est pas venus pour voir des Italiens disputer le pain du pauvre ouvrier étranger, des Allemands vaincus, des Français en guenilles — heureusement qu'il y avait Dati pour défendre la garde-robe des ministres de l'Hexagone —, des Anglais prêts à brader la couronne, des secrétaires d'État sans cigare, des présidents sans jet. Enfin, il faut tenir son rang, mes amis! Et maintenir intacts nos rêves de sous-développés. Vous ne vous rendez pas compte du mal que vous nous faites en détruisant ce qu'il y a de plus précieux dans nos têtes : l'illusion d'Europe. Le rêve de l'eldorado européen. L'alibi béton de notre exil. C'est-à-dire la raison pour laquelle nous sommes partis de chez nous.

Faites un effort pour vous ressaisir. Quant à nous, immigrés, il nous revient d'envisager deux solutions. D'abord, nous mobiliser afin de sauver le navire et de ne pas laisser tomber nos pauvres frères européens. Ensuite, prêter nos bas de laine à Dame République, cotiser pour sauvegarder le train de vie des rois et des reines, redorer le blason de l'Union européenne (UE). Sans cela, l'empire européen, toujours présent dans nos cœurs d'ex-colonisés, ne sera plus qu'une nostalgie. Il ne nous restera plus qu'à préparer nos valises et à nous apprêter à enjamber la Méditerranée, destination nos anciennes terres, lesquelles risquent de devenir le futur refuge des Européens. Nous leur accorderons l'hospitalité. Ainsi nous serons quittes devant l'Histoire.

  (Jeune Afrique, 18-24 juillet 2010)

  XX113857

Partager cet article
Repost0
25 juillet 2010 7 25 /07 /juillet /2010 15:17

0001.gif

DES PRESIDENTS INAMOVIBLES SUR LES CHAMPS ELYSEES LE 14 JUILLET

 

          Si la présence de 13 chefs d'Etat africains francophones, invités au défilé du 14 juillet 2010, a suscité des remous parmi des intellectuels africains et des ONG, au nom des droits de l'homme,ceci est pour l'essentiel lié à la nature de nombre de régimes africains dont ces présidents sont l'incarnation, ainsi qu'à la personnalité de certains parmi eux.

          En effet la principale caractéristique de la politique en Afrique aujourd'hui, c'est l'existence de régimes hybrides, mi-république, mi-monarchie, voire indéfinissables, parce que spécifiques. Rabelais le notait déjà dès le 16e siècle : L'Afrique apporte toujours quelque chose de rare.

          Sinon, comment qualifier une république dont le chef, après avoir vidé les institutions démocratiques de tout contenu, s'autoproclame "président à vie", son fils (dans certains cas) étant par automaticité appelé à lui succéder? Les dérives qui en découlent : violations répétées des droits humains, déni de justice, pillage des ressources nationales ... sont connues et constituent une justification de la protestation des opposants à cette invitation.

          La mystique traditionnelle du chef et de son pouvoir en Afrique, déjà évoquée dans un précédent article, est également à prendre en compte. D'aucuns évoquent aussi un certain héritage historique, notamment la colonisation et ses avatars. Quelle est donc la part de l'Europe dans l'instauration et la persistance d'un tel régime actuellement en Afrique ?


La part de l’Occident

 

Cette culture ancienne et cette tendance à l’autocratie sont sans nul doute confortées par un certain héritage historique.

Il est indéniable que l’écart entre les valeurs prônées par les puissances colonisatrices d’hier (les principes de liberté, égalité, justice …) et les méthodes de l’administration dans les colonies ont pu constituer une initiation à la mauvaise pente prise par les nouveaux dirigeants africaines, parce que sans doute la plus facile. La contradiction entre une nation porteuse théoriquement de droits universels et un système colonial conçu précisément pour ne pas les appliquer … Les méthodes d’administration despotiques tranchant violemment avec les idéaux républicains selon J.P. Dozon, cette culture de la violence comme mode de gouvernement fut l’unique référence vécue pour lesAfricains.

L’indépendance  acquise, ces méthodes furent mécaniquement reproduites par les premiers dirigeants africains sans volonté de remise en cause ni d’analyse du contexte nouveau. Ce modèle colonial de gouvernement, reproduit à l’identique devint la règle unique de rapport aux peuples alors même que ceux-ci ne sont plus sujets mais citoyens.

Le bourrage des urnes n’est pas non plus une invention des régimes dictatoriaux africains de nos jours. Il fut amplement pratiqué du temps de la colonisation par l’administration coloniale, principalement des gouverneurs et représentants de la République : aux Antilles, en Guyane, en Algérie (surtout) à partir de 1947. Les truquages fameux du gouverneur Edmond Naegelen aux élections des 4 et 11 avril 1948 sous le signe de la fraude, de la peur et du bourrage des urnes sont connus. Ceux du gouverneur Roger Léonard en 1954 afin de maintenir le statu quo en Algérie ne sont pas moins célèbres, tout comme la corruption électorale consistant à acheter les électeurs au moyen de billets, de sacs de riz ou de paquets de sucre.

La France (l’Occident en général) s’abrite derrière ses « valeurs » et mène en Afrique, notamment aujourd’hui encore, des pratiques en totale contradiction avec ses principes déclarés. Comment croire aux discours sur les « droits de l’homme » chaque jour assénés aux Africains quand les Occidentaux ont soutenu et soutiennent les pires dictateurs, ceux qui, précisément parce qu’ils bénéficient de ce soutien, privent leurs peuples de la jouissance de la liberté et des bienfaits de la démocratie ?

Pendant les décennies de règne Bongo, la France a soutenu un régime autoritaire et prédateur, sans pitié pour les opposants, dont les barons ont capté les dividendes du pétrole, arrosé les partis politiques français, massivement investi dans l’immobilier de luxe à Paris et laissé le peuple dans la misère.(Le Monde, Editorial, 20 juin 2009).

Que l’histoire, la colonisation, la guerre froide ou les Occidentaux aient leur part de responsabilité dans le déni de droits et les difficultés actuelles à asseoir la démocratie en Afrique ne souffre pas de doute. Mais on ne peut s’en tirer en s’abritant perpétuellement derrière des arguments qui imputent aux colonisateurs et à d’autres les tares de l’Afrique actuelle, le truquage électoral et la corruption … S’il est exact qu’il y eut bien une initiation des Africains par les Européens en ces domaines, en quoi de tels arguments peuvent-ils aujourd’hui, faire progresser l’Afrique ? Faut-il conserver des tares au prétexte qu’elles sont héritées de la période coloniale ou véhiculées par d’autres et ainsi vivre éternellement de modèles négatifs importés ?

Pourquoi ne pas s’inspirer de ce que cette même période coloniale a semé dans les esprits, les notions de liberté, justice, égalité, droits de l’homme ? Pourquoi la face sombre plutôt que la face lumineuse ?

gif_anime_3d_058.gif

 

Partager cet article
Repost0
18 juillet 2010 7 18 /07 /juillet /2010 14:32

    gif anime puces 011      DEFILE AFRICAIN SUR LES CHAMPS ELYSEES : QUETE DE SENS

 

           Fallait-il commémorer le cinquantenaire des indépendances africaines en même temps que la fête nationale française du 14 juillet  à Paris ?

          Fallait-il inviter des chefs d'Etat africains et leurs armées, en les associant à cet événement ?

         Pouvait-on, devait-on inviter l'Afrique sans ces chefs d'Etats ?

 

          Des Africains manifestent leur désapprobation. Des intellectuels dénoncent une "usurpation" voire une "indécence" de la part de la France : 

        "C'est d'abord une question de principe", estime l'ambassadeur de Côte d'Ivoire à Paris, qui s'explique :

          "Les 50 ans de l'indépendance, c'est notre anniversaire, pas celui de la France ... Ce n'est pas à elle d'organiser cela pour nous, c'est maladroit de sa part ... Nous ne fêtons pas l'époque coloniale, mais celle de l'indépendance."

          Des ONG africaines et étrangères  expriment également leur opposition à cette initiative.

         "On va faire défiler les armées, qui ont réprimé à Port-Gentil (Gabon), kidnappé à N'Djamena (Tchad) et tué à Brazzaville (Congo) ...", déplorent les unes.

         "Il est pour le moins indécent que l'esclavagiste célèbre la liberté de l'esclave qu'il tient encore enchaîné" s'insurgent d'autres.

 

          Et les Français, qu'en pensent-ils ?

         Selon un sondage réalisé en février 2010, 69% des Français interrogés ne se sentent pas concernés par cet anniversaire. Le même sondage réalisé sur le continent aurait permis de connaître l'opinion des Africains dans leur ensemble (non celle des seuls chefs d'Etat) sur cette question. C'eût été également l'occasion de sonder ces populations sur leur sentiment vis-à-vis de l'indépendance et de son bilan tout comme sur l'action de leurs dirigeants dans leurs pays respectifs. La question de fond c'est :

          - Qu'y a-t-il à commémorer ?

          - Quelle indépendance et quel bilan ?

          - L'Afrique des 50 ans d'indépendance vaut-elle une fête ?

          - Faut-il en rire ou en pleurer ?

 

Enfin

 

          - Qui doit commémorer ? Où ?

          L'idéal aurait été que l'Union africaine invitât la France en Afrique aux festivités de commémoration des indépendances africaines.  Cela aurait certainement eu plus d'allure, de clarté, en évitant toute interprétation équivoque. Mais surtout, les chefs d'Etat africains en prenant une telle initiative, auraient pu donner quelques preuves de la réalité de leur indépendance ainsi que de l'excellence de leurs rapports avec la France. 

          Plus que la commémoration des indépendances africaines à Paris, ce qu'il faut déplorer  - à mon sens -  c'est la célébration en ordre dispersé par chaque Etat africain de son indépendance. 

         L'Afrique éparpillée, donc désunie, n'a aucune chance de rayonner, c'est-à-dire d'être effectivement et pleinement indépendante. 

        Le destin de l'Afrique réside dans la Fédération des Etats africains.                               

                                                                           etoile 042

 

  

 14 juillet 2010

Sur les Champs Elysées

 

14 JUIL (Vu dans Continental, juillet-août 2010.)

 

 

Partager cet article
Repost0
11 juillet 2010 7 11 /07 /juillet /2010 16:21

110 F 9391596 Yy5W6ZQBTpQo2rr313VvC24fxCW5Li8j

 

LES RAISONS D’UNE CONTREPERFORMANCEu15426979

 

UN PARADOXE

 

D’un côté, des joueurs africains évoluant à l’extérieur, pétris de talents, que les clubs européens s’arrachent à prix d’or et qui font les beaux jours des championnats d’Europe, de l’autre, les équipes nationales dont ces mêmes joueurs constituent l’ossature et qui traînent leur médiocrité sur les terrains de la coupe du monde.

Point n’est besoin de citer des noms ici ; ils sont bien connus, ces « héros » subsahariens du ballon rond, auréolés de gloire à Londres, Manchester, Madrid, Marseille, Barcelone, Rome

Autant de compétences individuelles auraient pu permettre logiquement à leurs équipes nationales de briller, tout au moins d’occuper une place honorable lors de cette confrontation mondiale. Hélas ! C’est tout le contraire. Les résultats parlent d’eux-mêmes. Ils ne sont pas brillants. Est-ce un hasard ?

Le football ne saurait être dissocié du reste. Deux tares essentielles  – parmi d’autres raisons –  sont à l’origine du piètre résultat obtenu par les équipes nationales africaines.

1 – le manque de rigueur : c’est-à-dire l’absence de mesure, surtout de rationalité structurante. Au lieu de rigueur et de raison, dominent l’approximatif, l’à-peu-près, le plus ou moins … N’en déplaise à ceux qui rêvent du « bon sauvage africain », c’est-à-dire « l’homme des cavernes », allant nu, en totale fusion avec la nature, sans souci du temps, ni de sa mesure, ignorant l’heure, le souci du lendemain et le sens de l’épargne. On ne peut avec une telle culture rivaliser avec les meilleurs, ni même avec les moyens en ce monde. Je ne m’inscris pas dans cette vision de l’Africain du 21e siècle, pas plus quand il s’agit de football que d’économie et d’organisation de la société.

S’agissant précisément de football, on note des choses étonnantes en Afrique en ce 21e siècle.

Certaines équipes du continent, lors de simples compétitions dans le cadre de championnats nationaux, avant de pénétrer sur le terrain, doivent au préalable et de façon incontournable, soumettre les joueurs à tout un rituel censé leur assurer la victoire. L’irrationnel s’impose alors et dicte sa loi, guide les gestes, la conduite des joueurs et de l’équipe. C’est entre autres le cas au Sénégal. Le marabout, qui en impose à l'entraîneur comme à l'encadrement de l'équipe,  prend en charge la destinée de l’équipe, apparaît en l’espèce comme le maître incontesté, maître ès-miracles, tout puissant, dans un numéro où l’islam le dispute à l’animisme, au fétichisme, à la sorcellerie :

Je concocte des mixtures avec des plantes, je parle avec les esprits … il nous faut discuter avec les génies qui nous entourent. Ils nous aideront à gagner le match… Ainsi, les joueurs préparés vont avec puissance, et ils ne doivent pas rencontrer de femmes avant d’arriver au stade, dit le marabout.[reportage : Aurélie Fontaine, pour le mensuel africain Continental, juillet-août 2010.]

Depuis l’aube, rapporte la journaliste, le marabout concocte des breuvages magiques, tout en écrivant et récitant des versets du Coran. Il faut ensuite des heures, pour les faire ingurgiter par chacun des joueurs, lesquels auront ensuite le corps enduit d’onguent, de liquides et de poudres diverses.

Autant d’heures qui manqueront à la préparation physique et mentale des joueurs, à l’analyse de la configuration du terrain, celle de la technique et de la stratégie de l’adversaire … Ce qui par ailleurs dispense de toute réflexions sur soi, donc de toute responsabilité dans le résultat futur. Après le match « en rentrant au vestiaire, les joueurs délacent soigneusement la bande de tissu beige confiée par le marabout qu’ils ont nouée autour de leur cheville gauche".

Or, c’est la recherche et l’analyse rigoureuse de ses forces et ses faiblesses qui augmentent, sinon assurent les chances de victoire. Et le cas échéant, de tirer les leçons de l’échec afin de progresser.

Le plus étonnant, c’est que ce marabout attitré, lié à cette équipe dakaroise (chaque équipe ayant son ou ses marabouts) est un fonctionnaire exerçant dans un ministère à Dakar.

Les clubs étrangers, européens en l’occurrence, extraient d’Afrique de jeunes mineurs de 12 à 16 ans, qu’ils forment, pas seulement à la technique du jeu, mais à la nécessaire rigueur de l’entraînement, celle du geste, de l’analyse raisonnée de son jeu et de celui des autres, et qui ne sont nullement soumis à la science occulte d’un marabout qui joue à leur place, en accaparant leur mental.

Je suis par ailleurs conscient des limites de la rationalité. Autant l’excès de rationalité peut dessécher l’esprit, en le privant des bénéfices du rêve, voire de la fantaisie, partie intégrante de l’humain, autant l’abandon total à l’irrationnel peut être inhibiteur et nuire ainsi à l’autonomie de pensée et d’action, devenant synonyme de dépersonnalisation.

2 – L’irrationnel imprègne les cultures africaines subsahariennes.

Incarné par les sorciers, féticheurs, charlatans et autres marabouts de tous acabits, l’irrationnel fait partie intégrante de la vie et submerge la conscience de l’individu. Ainsi tout événement malheureux : maladie, accident, mort, revers de fortune, échec professionnel ou sentimental est imputable à autrui, plutôt qu’à soi-même. C’est commode, cela repose l’esprit, dispense de juger et de se juger.

Il en est de même dans le regard que nombre d’Africains portent sur la situation actuelle de l’Afrique. Ainsi, si ce continent peine à émerger, c’est la faute des autres : de l’histoire, de la mondialisation … Le professeur Francis Akindès (sociologue, université d’Abidjan), l’exprime ainsi :

L’esclavage et la colonisation sont ainsi convoqués devant le tribunal de l’Histoire. Nous savons bien, pourtant, que depuis les indépendances, les responsables du malaise persistant dont souffrent nos sociétés ne sont ni les esclavagistes d’avant-hier, ni les colonisateurs d’hier. Ce sont des proches, des parents, des amis, des voisins qui, sans états d’âme, avec ou sans complicités extérieures, se sont saisis de l’appareil d’Etat pour en jouir exclusivement. Pour assouvir leur désir de puissance, ils ont fait emprisonner, torturer, tuer, organisant le désordre politique à leur profit.

Or, l’autocritique lucide, objective et rigoureuse, permet l’élévation de soi par soi. Tant que nous ne nous guérirons pas de cette culture de « l’irresponsabilisation », de l’absence de rigueur dans l’analyse, dans la pensée et le jugement, dans le geste et l’action, l’Afrique continuera de donner cette fâcheuse impression de « s’étrangler toute seule ».

etoile 018 etoile 018etoile 018

Partager cet article
Repost0
4 juillet 2010 7 04 /07 /juillet /2010 17:07

gif_anime_puces_003.gifLA VICTOIRE OU LA RELEGATION CIVIQUE : CRIME ET CHATIMENTS AU NIGERIA...


          Si la défaite d'une équipe nationale en phase finale de la coupe du monde de football est généralement mal vécue par la population concernée, une telle défaite prend des allures de crime d'Etat, voire de lèse-majesté ou d'insulte au chef de l'Etat. La récente réaction du chef de l'Etat nigérian à la défaite de l'équipe nationale en est une illustration.

          Parce que l'équipe nationale a été éliminée dès le premier tour (battue o-1 par l'Argentine, 1-2 par la Grèce, match nul 2-2 face à la Corée), le président du Nigeria semble avoir pris cette défaite comme une insulte à sa personne et a, pour cette raison, suspendu l'équipe nationale pour deux ans ! (Fait du prince !)

          Il y a des précédents : en Guinée du temps de Sékou Touré (emprisonnement des joueurs). Au Zaïre : la foudre du président Mobutu sur la tête de l'équipe nationale lors de la coupe mondiale de football en Allemagne en 1974. Les sanctions furent autrement plus sévères : un véritable ostracisme à l'égard des joueurs (prison et sanctions financières, "mise en quarantaine" des proches  ...)

          Pour le Zaïre il est vrai, la défaite de l'équipe nationale, par son ampleur, fut sans doute une première dans l'histoire de cette compétition mondiale depuis sa création en 1930 : 9-0 face à l'Ecosse !

          Mais qui prépare une équipe nationale à affronter une compétition mondiale ? Le fait que des régimes africains soient les seuls au monde à s'illustrer par ce genre de réaction surdimensionnée est en soi significatif de la nature de ces régimes : démocratie ? autocratie ? "mégalocratie"? ...

          Le football n'est pas la guerre. Cette hiérarchie des valeurs est plus que discutable. La corruption, l'évasion fiscale, les trafics en tous genres, le déni de justice font infiniment plus de mal à l'image d'un pays qu'un match perdu, fût-il un match de coupe du monde.

          Arrivé au pouvoir à la faveur d'un coup d'Etat, le "maréchal-président à vie", Mobutu (comme d'autres  chefs d'Etat avant et après lui) a voulu se servir du foot pour asseoir son régime et assurer son emprise sur les populations.

          Des joueurs qui n'ont fait que perdre et qui n'ont eu aucun comportement délictueux, ni honteux, qui n'ont pas fait "grève" de match ou d'entraînement, mais qui se sont battus et ont perdu à la régulière face à plus fort qu'eux.

          Si ces dirigeants "scrupuleux" avaient le même sens de l'honneur national dans leur action de tous les jours, l'Afrique s'en tirerait sûrement mieux, pas seulement en football mais en tous domaines, pour le plus grand bien du mieux-être de leurs populations et pour l'image du continent.

          Si la culture du résultat et l'exemplarité doivent caractériser l'action de ceux qui sont revêtus des couleurs nationales, les responsables politiques africains devraient être les premiers concernés en la matière.

ligne_1_025.gif

Partager cet article
Repost0
27 juin 2010 7 27 /06 /juin /2010 16:37

a686.gifL'enfant africain entre tradition et "modernité"

 

 

        En Afrique, la place de l'enfant meriterait d'être mieux définie pour son équilibre, partant, celui de la société dans laquelle il évolue. A cet égard règne parfois une confusion préjudiciable à une éducation dont la finalité serait l'épanouissement de l'enfant.

 

Ce qu'en dit le Camerounais Ferdinand Ezembé, docteur en psychologie,  pour son pays, est aussi valable dans bien d'autres régions d'Afrique.

 

Deux types de juridictions cohabitent au Cameroun. Une première, écrite, dite « officielle » ou encore « légale » inspirée des législations des anciens pays colonisateurs (France et Angleterre) appliquée dans différents tribunaux du pays et faisant l'objet d'un enseignement dans les facultés de droit des universités du pays. Une seconde, dont l'usage est le plus répandu, inspirée des coutumes et des normes traditionnelles, c'est le droit coutumier. Il est transmis et exercé de façon orale, son application est assurée par un chef de village, assisté d'un conseil de famille, composé de personnes âgées dont l'intégrité est reconnue de tous. Il arrive souvent que les avis divergent à propos de l'interprétation d'un acte, entre la vision du droit occidental et celle du droit coutumier. Si dans la plupart des cas c'est le droit occidental qui prévaut, il arrive aussi que les parents soient renvoyés vers une législation traditionnelle, ce qui peut être un facteur déstabilisant pour l'enfant et sa famille. Il peut aussi arriver que l'un des protagonistes, s'estimant lésé dans une procédure, décide de s'adresser à celle qui l'aurait plutôt avantagée.

 

L'enfant dans le droit coutumier africain.

 

Dans un compte rendu relatant la rencontre des enfants travailleurs en Afrique, je fus surpris de voir noter parmi les délégués, des « enfants » de 18 à 25 ans. Dans l'imaginaire populaire africain l'âge n'est donc pas le seul critère pour identifier un enfant ; pour les filles la puberté signifie l'entrée dans l'âge adulte, mais aussi la responsabilisation et l'entrée en une sexualité active et autorisée ; ce phénomène est tardif chez les garçons qui peuvent s'entendre dire lors d'une assemblée par des personnes plus âgées « tais toi, tu es encore un enfant » même si ils sont déjà chefs de familles. Il est donc difficile de définir les notions de majorité ou de minorité dans ce contexte. La majorité coutumière est souvent précoce (14 ans pour les filles) tandis que la majorité légale est plus tardive (18 ou 20 ans).

 

La crise d'autorité

 

Selon Manga Békombo, la grande mutation qui s'opère en Afrique noire a pour effet particulier de démunir les parents de l'autorité qu'ils exerçaient sur leur enfant. Les fondements de cette autorité, sa légitimité et sa validité se révèlent brusquement faux. En ville, le rapport aîné/cadet a cédé le pas au rapport riche/pauvre, le groupe s'est effrité pour laisser apparaître l'individu, et aux limites que prescrit le droit (qui doit ?) s'est substitué le devoir que suggère l'aptitude (qui peut ?). Le fils se voit dans l'obligation de ne compter que sur lui-même dans le rôle sur lequel reposait autrefois l'autorité paternelle. Le jeune éprouve alors le sentiment de frustration et d'insécurité qui le pousse soit à fuir le domicile de ses parents, soit à s'y maintenir, mais démuni de tout désir de se confectionner une vie-. L'éducation communautaire qui était un renforcement de l'autorité du père peut devenir une source d'incertitude et de doute pour les enfants, dans certains cas, les avis des oncles pouvant être contraires à ceux des parents. Marie Chantal Cacou remarque qu'en milieu urbain, les parents africains consacrent très peu de temps à leurs enfants, non par démission, mais parce qu'ils doivent jouer un rôle auquel ils n'ont pas été préparés, c'est-à-dire, considérer leurs enfants comme des partenaires égaux d'une part, mais aussi s'en occuper tout seuls, contrairement au contexte traditionnel où l'enfant était sous la protection de tous les adultes.

 

D'autre part, « les parents africains ne sont plus sûrs des valeurs qu'ils veulent transmettre à leurs enfants ». Les sociétés traditionnelles africaines proposent la solidarité, l'esprit communautaire, l'honneur, l'intégrité, la pudeur. La société moderne propose l'individualisme, la compétition, la liberté sexuelle... Cette incertitude, mêlée d'un conflit de valeurs, est souvent la source de nombreux conflits parents/enfants. On peut alors se demander ce que devient un père africain dont le savoir social est dévalorisé.

  

 

Aujourd'hui, avec l'introduction de l'économie de marché, la plupart des analyses convergent pour affirmer qu'il y a dégradation du statut des grands-parents dont l'image se ternit et le pouvoir s'effrite. Avec la généralisation des institutions scolaires qui supplantent l'oralité traditionnelle, de tous les changements, le plus décisif est celui qui affecte le pouvoir de savoir. Selon Emmanuel Terray, les vieux, ne disposant guère de sanction concrète pour trancher les conflits ou imposer des punitions, doivent plutôt convaincre les parties opposées afin de procéder à la réconciliation. Pour cela, ils font surtout appel à l'idéologie de la parenté. En se découvrant des relations de parenté souvent très compliquées et très indirectes, ils peuvent arranger l'affaire selon des normes de parenté.

  

 

S'il y a crise d'autorité cela ne veut pas dire, pour autant, que celle-ci a disparu. Que ce soit en milieu rural ou urbain, on observe que l'avis du père pèse encore sur le devenir des enfants. Il y aurait, comme le disait le sociologue camerounais Jean Marc Ela, « du rural dans l'urbain », malgré le fait que les personnes vivent en ville, les principales décisions se prennent encore au village avec la bénédiction des pères, les cérémonies traditionnelles sont encore dirigées par les personnes âgées encore appelées anciens ou aînés. Le milieu urbain n'a donc pas fait disparaître l'autorité supra-sociale qui demeure le privilège de la séniorité.

           (Les Cahiers de l'A.F.I.R.E.M., déc. 2009, La violence dans tous ses états)

 

 

(Voir ma contribution : "De la relativité culturelle des châtiments : punition des enfants au Mali", dans "Les Cahiers de l'Association Française d'Information et de Recherche de l'Enfance Maltraitée" (A.F.I.R.E.M.), décembre 2009).

 

 

          Qu'en pensent les enfants eux-mêmes ?

            La déclaration faite par leurs délégués lors de la 5e rencontre des Enfants et Jeunes Travailleurs d'Afrique tenue du 30/10 au 14/11/2000, à Bamako, capitale du Mali, dont suit le résumé fait par Manfred Liebel, est symbolique à plus d'un titre, entre conditionnement et aspiration au changement :

 

 

« Les enfants travailleurs d'Afrique rejettent la limite d'âge minimum pour exercer un travail, mesure figurant dans la convention de l'OIT n° 138 (1973) et, conformément à cela, dans la législation de plusieurs pays africains. Par contre ils insistent sur la reconnaissance et la valorisation de leur travail et sur le droit d'effectuer des tâches faciles et adaptées, qui leur laissent la possibilité de continuer à étudier et de se distraire. En ce qui concerne le système scolaire, leur opinion est que l'obligation scolaire ne doit pas exclure toute forme de travail, mais leur donner la possibilité d'acquérir, en lien avec leur travail, des connaissances et des savoir-faire qui leur seront utiles dans la vie ».

  150.gif014.gif

Partager cet article
Repost0
20 juin 2010 7 20 /06 /juin /2010 15:21

INVERSION DES CULTURES ?

 

 

 

 Chine Occident

 

 

 

 

 

Regardez bien ces deux photos, prises toutes les deux en 2010, à quelques semaines d'intervalle : elles en disent des tonnes...

 

La première fixe un instant d'une rencontre à Washington, le 12 avril dernier: c'est le président américain, Barack Obama, qui accueille son homologue chinois, Hu Jintao, au sommet sur la sécurité nucléaire. Il s'incline devant son visiteur.

 

La seconde a été prise à Pékin, le 28 avril. Cette fois, c'est le président chinois qui reçoit son homologue français, Nicolas Sarkozy, et c'est le visiteur qui s'incline devant son hôte.

 

                                                                                                  (Jeune Afrique, 9-15 mai 2010)

 

 

    Derrière les images et les attitudes, le sens ...

 

002 

Partager cet article
Repost0
16 juin 2010 3 16 /06 /juin /2010 17:23

ecureuil_002.gifBIEN VIVRE OU VIVRE LONGTEMPS

 

          On songe moins à bien vivre qu'à vivre longtemps. Et pourtant chacun est maître de bien vivre, nul ne l'est de vivre longtemps.


          La vie s'épuise à chercher les moyens de vivre. Regardez les individus, regardez l'espèce : tous ont l'oeil fixé sur le lendemain. Quel mal y a-t-il à cela ? dites-vous. Un mal immense. On ne vit pas, on se propose de vivre, et vivre est renvoyé à plus tard.

                                                                       Sénèque

 

 

         

        Pour moi, bien vivre, c'est vivre pleinement son humanité.

arb_plante_038.gif

Partager cet article
Repost0
13 juin 2010 7 13 /06 /juin /2010 17:05

Caa0219.jpgHISTOIRE ET TABOU : LA TRAITE ORIENTALE OU ARABO-MUSULMANE

  

  

          L'opacité caractérise l'évocation de la traite orientale arabo-musulmane qui coûta à l'Afrique des dizaines de millions de vies. Les razzias opérées par les Arabes (avec la complicité de quelques chefs africains, moralement dévoyés) du VIIe au XXe siècle ont vidé l'Afrique de sa substance vive et profondément déstructuré les sociétés.

          Pourquoi parle-t-on tant de la traite atlantique (autre fléau) pratiquée par les Européens du XVe au XIXe siècle et si peu de la traite orientale qui fit encore plus de victimes que la première ?

          Or ce voile jeté sur les pires crimes de masse commis contre les peuples africains noirs explique pour une part la persistance de l'esclavage ouvertement pratiqué ou discrètement voilé dans nombre de régions, d'Etats arabes ou arabo-musulmans de nos jours : Moyen-orient, Soudan, Mauritanie, Niger ...

           Il est du devoir des intellectuels arabes, en tout premier lieu, et africains d'autre part,de s'atteler à une tâche historiquement salutaire d'enseignement  et d'information des peuples arabes et africains, non dans un esprit de revanche ou de mise au pilori, qui nourrirait haine et ressentiment, mais de concorde et d'humanité. Car la haine ne construit pas. Elle appauvrit ceux qui la portent et handicape l'avenir.  La meilleure thérapie pour la conjurer, c'est le courage d'assumer le passé pour s'ouvrir aux autres, dans un esprit de totale fidélité à l'histoire et de réconciliation des mémoires.

          Toutes les traites négrières : européenne, arabo-musulmane ainsi que toutes les complicités africaines doivent faire l'objet d'enseignement, de publications, de débats afin d'informer pour savoir et comprendre et guérir des traumatismes historiques.Cela ne peut se faire que par la connaissance et la transparence des faits passés si douloureux soient-ils. L'Histoire a horreur du tabou.

           S'impose donc aux intellectuels arabes comme aux intellectuels africains ce devoir de connaissance et de vérité : informer, populariser, cet épisode exceptionnellement cruel et sanglant de notre histoire commune afin d'assainir les rapports du présent en mettant fin au conditionnement mental de bien des Orientaux dans leurs rapports aux Africains noirs. Les caravanes transsahariennes de captifs africains d'hier sont aujourd'hui relayées d'une certaine façon par les caravanes de migrants clandestins en quête d'une vie meilleure qu'ils espèrent trouver en Europe. Et c'est sur le chemin de l'Europe qui passe par le désert du Sahara, que nombre de ces Africains subissent un autre esclavage infligé par leurs "frères" politiques ou de religion : Marocains, Algériens, Libyens ... qui n'est pas sans rappeler d'autres caravanes du VIIIe ou du XIXe siècle sur les mêmes routes du désert.

               Le journaliste italien, Gatti Fabrizio1, lève ainsi le voile sur un pan de cette actualité :

 

                           Pour ne pas mourir de faim, ils travaillent gratuitement dans les maisons des commerçants. Ils lavent les casseroles, s'occupent des jardins, cueillent des dattes, pour un plat de pâtes, un café ou quelques cigarettes. Ils voulaient arriver en Italie, ils sont devenus esclaves. Seulement après des mois de travail, le patron les laisse partir. Mais la peur de tous est de rester prisonnier plus d'un an. Ceux qui sont dans ce cas sont devenus fous et vivent dans les maquis. C'est une vieille histoire. Les Arabes libyens considèrent que les habitants de la côte africaine sont des êtres inférieurs. Avant, ils traversaient le Sahara pour les acheter et les revendre comme esclaves. Maintenant, ils les amassent sur des camions, et les traitent plus mal que des bêtes. Personne ne s'inquiète si ces clandestins meurent dans le désert.

                        

               Personne, ni les Etats dont ils sont ressortissants, ni les ambassades de ces Etats dans les pays concernés ne se soucient en effet de leur sort.

  

                Aucune organisation humanitaire. Aucun père. Aucun frère. Aucun des gouvernements dont les choix corrompus les ont conduits là où ils sont, ne pleurera jamais leur mort. Depuis qu'ils sont partis, ils sont les enfants de personnes.

  

                Cet esclavage subi dans l'indifférence générale, par des Africains, dans des pays africains, membres de l'Union africaine, est-elle concevable ?

                 Au service de qui, de quoi, cette "Union" oeuvre-t-elle ?

 

1 Gatti Fabrizio, Bilal sur la route des clandestins, Liana Levi, 2008.

 

            Scorpion-0.gif

Partager cet article
Repost0