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7 juillet 2013 7 07 /07 /juillet /2013 07:29

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Après les missionnaires chrétiens, les chemins de l’islam en Afrique

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Les routes suivies par les religions importées sont le reflet des premiers contacts avec l’extérieur : l’islam par le Sahara, le christianisme par l’Atlantique.


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Islam en Afrique. Premières installations.

 

Comparant la progression du christianisme et de l’islam sur le continent, Louis Vignon, professeur à l’école coloniale (1919), tente d’expliquer l’avantage pris par l’islam sur le christianisme auprès des populations africaines. Voici ce qu’il écrit :


 

« Quels sont les « missionnaires » de la religion nouvelle ?


Les uns et les autres suivent, suivant les époques et les régions. Au XIe siècle, les Almoravides, des noirs convertis par eux ; plus tard et toujours, des personnages noirs agissant les uns par la force, les autres par persuasion, des Sarakolé et des Toucouleurs revenant de la Mecque, aussi des voyageurs et des marchands (notamment des colporteurs dioula).



Pourquoi ces succès ?


Parce que, d’abord, les missionnaires musulmans représentent l’attaque, et l’attaque contre une religion passive, imprécise dans ses contours [l’animisme], le plus souvent sans organisation ; puis, parce que ces hommes, -Maures, Touareg, Arabo-Berbères métissés du désert, Ouadaïens, Darfouriens, Toucouleurs, Haoussas…- des gens rudes et primitifs, portent aux Noirs fétichistes, de mentalité proche de la leur propre, une religion simplifiée, déformée par l’ignorance, prometteuse de félicités célestes toutes matérielles, tolérant une foule de pratiques fétichistes, très proche d’ailleurs, par certains côtés, des « lois naturelles » qu’ils suivent eux-mêmes.


Le fils de Dieu envoyé sur la terre pour y mourir en croix, percé au flanc comme un vaincu, comment cette belle fable de bonté pourrait-elle pénétrer la raison et le cœur des Noirs ? Que peuvent-ils entendre lorsqu’on leur raconte l’histoire de la Vierge, -une femme, -lorsqu’on leur enseigne le culte qui lui est rendu ? L’interdiction de la polygamie, l’obligation de libérer ses esclaves sont, d’autre part, des règles contraires à leurs goûts, leurs intérêts.

Comme la religion de Mahomet se présente, au contraire, simple et facile ! Le missionnaire drapé d’un burnous, roulant un chapelet dans ses doigts, souvent à tête vénérable, habile dans ses effets, n’aura pas négligé de raconter quelques merveilleuses histoires touchant le pèlerinage de la Mecque ou les miracles accomplis sur le tombeau du Prophète, avant de solliciter l’ace d’adhésion à l’islam. Celui-ci est aisé : on conduit le Noir à la mosquée, qui n’est souvent qu’un dessin de cailloutis sur le sable en forme de fer à cheval on le fait se tourner vers l’est pour prononcer l’acte de foi… « il n’y a de Dieu que Dieu ». Cela est tout ; les paroles surnaturelles dites, voilà le Noir devenu musulman. Désormais, il fera le salam cinq fois par jour ; rien cependant, ne lui apprendra qu’il est passé sous une nouvelle loi : il aura le droit de garder ses femmes et de continuer à les traiter en esclaves ; le droit, aussi, de conserver ses captifs ; il restera affilié à ses associations sociales ou religieuses, conservera ses fétiches, ses tabous, ses gris-gris et aussi sa foi dans les Esprits que craignaient ses pères. Nul changement dans sa vie. Pour le Dieu unique, sévère, grand dans son isolement, le comprendra-t-il ? […]


En résumé, toutes les croyances se mêlent dans sa tête, toutes les pratiques lui paraissent bonnes. Le Ouolof musulman de Saint-Louis du Sénégal convie à la bénédiction de sa maison le curé, le mofti [ou mufti = interprète autorisé de la loi musulmane] et le féticheur. Dans de nombreux villages convertis, l’imam est chargé de porter au caïman de la rivière ou à tel autre animal tabou, de la nourriture et des présents. Dieu est partout pour le Noir. Puis, en beaucoup de régions, il a embrassé l’islam par genre, par mode, pour faire comme le voisin, surtout pour revêtir le boubou. « Le boubou, a dit Binger [explorateur français du XIXe siècle], fait la moitié du musulman ».


Ainsi, le converti connaît et comprend mal sa religion ; il n’apprend pas toujours la langue du Prophète et conserve son dialecte. L’arabe ne sera pour lui qu’une langue liturgique comme chez nous le latin d’église pour les paysans. »


 

bouton 006Autres propagateurs et autres raisons du progrès de l’islam.


Une autre explication à la percée rapide de l’islam en terre africaine, sans être aussi philosophique ou ethnosociologique, pourrait également être avancée.


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Islam et christianisme en Afrique

 

Les États d’Afrique du Nord, de l’Égypte au Maghreb, ont fait partie des premiers pays islamisés dès le début des conquêtes arabo-musulmanes aux VIIe et VIIIe siècles. L’islam commença sa pénétration en Afrique noire à partir du VIIe siècle par deux entrées principales. Le commerce transsaharien qui suivait les routes des échanges entre les peuples au sud du Sahara et ceux d’Afrique du Nord fut l'un des principaux moyens d'islamisation. Ce commerce mit en relation directe les Africains avec les musulmans venus du Nord. Le progrès de l'islam parmi les populations noires s'explique par le fait que son adoption apparaissait alors comme un signe d'ascension sociale car les commerçants musulmans, ceux d'Afrique du Nord de passage ou installés parmi les Noirs bénéficiaient d'un grand prestige. Les premiers autochtones à se convertir à l'islam jouissaient du même prestige. En plus de leurs richesses, la maîtrise de la lecture et de l'écriture de l'arabe leur conférait une véritable aura dans la société. Ces marchands furent les principaux propagateurs de l'islam en Afrique de l'Ouest où la nouvelle religion progressa par étapes du VIIe au XVIIIe siècle.

 

Ainsi, du XIe au XIXe siècle, l’Afrique s’ouvre progressivement aux deux principales religions, islam et christianisme, qui grignotent peu à peu du terrain sur les croyances locales, sans éliminer totalement ni définitivement leur prégnance sur les esprits. Ce continent est ainsi le lieu de la coexistence des religions, celui du syncrétisme par excellence.

 


bouton 006La nouvelle donne


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Les sectes en Afrique (2010)

(Source : L’Atlas des religions)

 

Mais, il est une autre réalité religieuse en Afrique aujourd’hui : la fulgurante progression des sectes aux dépens et de l’islam classique et du christianisme classique, tout comme des croyances locales anciennes.

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