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18 juin 2011 6 18 /06 /juin /2011 08:41

001-copie-2La mémoire de l'Afrique002.gif

 

      L'histoire a un rôle fondamental à jouer dans la construction des Etats africains et dans celle des identités africaines, après les épisodes majeurs que furent la traite et la colonisation. Le fait de savoir ce qu'était l'Afrique avant le contact avec l'extérieur : l'islam et l'Europe, permet de savoir où aller demain. Pour dégager les voies du futur, il importe de savoir ce qui manque précisément aux peuples africains d'aujourd'hui. Rétablir le passé avant et à partir de la rencontre heurtée avec le monde arabe et le monde européen reste une priorité majeure, y compris dans les objectifs de développement ; car il n'est pas de développement possible sans culture et sans connaissance de soi. On ne peut donc comprendre l'Afrique d'aujourd'hui en ignorant tout cet héritage précolonial et colonial qui a déstructuré ou restructuré un certain nombre d'éléments culturels.

    Il est bien entendu hors de question que les Africains s'enferment dans leur passé originel. Il s'agit bien de réaliser une synthèse de tous ces héritages, de l'intérieur et de l'extérieur.

Pour que cette synthèse soit féconde, il est indispensable de retrouver les identités premières afin d'être en capacité de s'ouvrir aux apports extérieurs sans les subir.

      Il faut par conséquent restituer la mémoire de l'Afrique afin que les Africains soient eux-mêmes. Toutes les bonnes volontés africaines et non-africaines sont conviées à cette tâche de refondation, hautement salutaire pour une bonne intégration de l'Afrique dans le concert du monde.

      Les historiens européens doivent de leur côté, procéder eux aussi à un réexamen, en vue d'une ré-écriture de l'histoire de l'Afrique telle qu'elle fut écrite et enseignée durant la période coloniale, voire depuis le XVIe siècle, afin de dégager des points de convergence avec la vision des historiens africains sur la même période. De nouveaux objets, de nouvelles sources, écrites mais aussi orales, doivent servir de matériaux de base à cette fin.

Cette coopération entre spécialistes (historiens africains et non-africains) est aussi souhaitable pour une autre raison selon le professeur Jean Devisse (historien médiéviste, spécialiste de l'Afrique de l'Ouest). Il s'en explique :

bouton_007.gifIl faut que, du point de vue africain, les Africains aient la liberté, avec le concours mondial, de restituer cette identité culturelle, et que du point de vue mondial, nous y coopérions de notre mieux. Avec humilité.

Mais je crois que cela n'est pas non plus indifférent aux non-Africains et je voudrais ici y insister encore plus pour deux raisons : d'abord en ce qui concerne le monde blanc tout entier, nous ne déracinerons pas toute une série de préjugés culturels, raciaux et autres de l'homme blanc à l'égard de l'Afrique et des Africains, tant que nous n'aurons pas fait une analyse spectrale totale, correcte, des moments où sont apparus tels ou tels phénomènes culturels dans la mentalité de l'Occident ou plus largement dans la mentalité de tous les blancs, à l'égard des non-blancs.

Il y a là un problème qui intéresse au premier chef, l'avenir moral, l'avenir culturel, donc l'avenir politique du monde blanc.

Et d'autre part, dans le dialogue avec l'Afrique et les Africains, il y a des sujets extrêmement brûlants qu'il ne faut pas hésiter à aborder. Le sujet de la traite est un sujet extrêmement important. II faut aller au fond, il faut aller au bout, il faut aller jusqu'au moindre détail de l'analyse ; et tout le monde doit le faire avec une très grande honnêteté et un très grand calme. Ni les uns, ni les autres, nous, hommes du XXe siècle, nous ne sommes responsables de nos ancêtres. Ni les uns, ni les autres. Car nous sommes totalement innocents, les uns et les autres, dans cette affaire. Et les Africains le savent bien, quand ils commencent à travailler sur ce sujet, comme nous le savons nous-mêmes.

Par conséquent, il y a là des sujets très brûlants qu'il est urgent, important, d'aborder pour la naissance d'un esprit international historique, et ceci en toute clarté.

C'est vrai de la traite. C'est vrai des relations entre l'Islam et l'Afrique. C'est vrai pour bien d'autres questions qui apparaîtront peu à peu. 

(Pr Jean Devisse, RFI, 1975)

 

 

Cet appel de 1975 est encore d'actualité.

Il s'agit de faire que l'Histoire soit facteur de rencontre et d'enrichissement mutuel, sans rien renier de son essence : la restitution du passé dans sa vérité.

 

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commentaires

P
<br /> <br /> Bravo!<br /> <br /> <br /> <br /> Pointeuse<br /> <br /> <br /> <br />
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<br /> <br /> Merci !<br /> <br /> <br /> <br />
L
<br /> <br /> Cher Tidiane,<br /> <br /> <br /> même si, parfois, je choisis de parler sur un point précis en des termes qui ne sont pas tout à fait les vôtres, avec VOUS j'ai le sentiment d'être toujours<br /> en accord profond : avec votre culture, votre sensibilité, votre passion exigeante et chaleureuse. Amitié, Luc.<br /> <br /> <br /> <br />
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<br /> <br /> Cher Luc,<br /> <br /> <br /> Quels que soient vos commentaires, je les apprécie. Ils sont toujours intéressants et surtout<br /> enrichissants. Amitiés. TD<br /> <br /> <br /> <br />
L
<br /> <br /> Ah, cette fois, voilà un message qui emporte mon adhésion sans hésitation ni restrictions. J'aime toujours voir quelqu'un qui aime et approfondit ses<br /> racines, ce qu'il est, et surtout ce qu'il a d'unique, ce trésor que d'autres n'ont pas et dont il est porteur. L'Afrique est sans nul doute particulièrement riche de cette façon-là. Bien<br /> dit, cher Tidiane, et merci. Amitié, Luc.<br /> <br /> <br /> <br />
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<br /> <br /> Que cela me fait plaisir que nous soyons d'accord sur ce point ! Amitié.TD<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br />